Apprivoiser sa voix grâce à celle des autres

Extrait d’un article en lien avec ma pratique de transmission de l’import vocale et de mon expérience récente d’animatrice de Chant pour tous.
Chanter ensemble amène de nombreux bienfaits qui ne sont plus à démontrer. Ici, je voudrais aborder un des aspects qui me semble assez présent lors des Chants pour tous.
En tant qu’animateurs, nous sommes en position d’observation participante… j’observe plein de choses, et vous aussi. Et ce qu’on observe à propos des autres peut bien souvent s’appliquer à nous-mêmes également.
Je suis amusée et fascinée par ce qui se passe quand on chante ensemble, particulièrement quand on réunit des personnes qui ne se connaissaient pas l’heure précédente, et qui n’ont forcément pas les mêmes tessitures, répertoires vocaux, attentes et attitudes…

Qu’est-ce que veut dire chanter ensemble?

Différentes modalités et façons de s’y prendre…

– chanter à l’unisson?

– chanter en écho, l’un après l’autre?

– chanter plus ou moins fort que l’autre pour que l’on puisse s’entendre?

– chanter une octave plus haute ou basse pour rester dans notre confort vocal?

– …

Qu’est-ce que l’on fait au juste, si ce n’est s’adapter à l’autre voix en fonction de la sienne ? Se met alors également en place un jeu, au sens premier du terme. Ce jeu bien moins anodin qu’il n’y paraît est une conversation où chacun va tenir un ou plusieurs rôles. Comme dans notre vie quotidienne, lorsque nous chantons, nous agissons en fonction de notre subjectivité. Si les pratiques artistiques sont un terrain propice pour bousculer cette subjectivité et incarner une autre façon d’être au monde, le chant à plusieurs est une place où s’observent des jeux relationnels évocatifs et où l’on peut requestionner notre place et surtout la façon de l’ancrer sereinement dans un cadre protégé.

Que cherche-t-on au juste ?

  • faire entendre à l’autre notre voix et acquérir sa reconnaissance tacite de sa justesse, son originalité, son esthétique ?
  • obtenir de l’autre une réponse à ce qu’on vient de chanter et donc instaurer un dialogue au sens propre ?
  • harmoniser nos voix pour atteindre un idéal esthétique déjà connu et reconnu par l’extérieur ?

Quel rôle je joue devant les autres ?

Il n’est pas question ici de développer plus avant les mécanismes relationnels en jeu, mais simplement de mettre en exergue quelques aspects que l’on va retrouver dans ce contexte particulier du chant improvisé :

  • rapports de force plus ou moins établis mis en scène par le jeu vocal, avec les rôles de composition permis par ce cadre privilégié
  • attitude de repli ou affirmation de sa présence
  • écoute timide mais intégrative qui permet de se lancer au moment opportun pour soi
  • paradoxe intérieur du vouloir et ne pas vouloir être entendu, avoir envie d’y aller mais ne pas oser
  • frustration de l’expérience vécue comme inaboutie
  • sensation désagréable de dysharmonie d’après les normes harmoniques occidentales
  • confrontation aux voix qui ne nous « parlent » pas : qu’en faisons-nous ?
Que cela nous fasse peur ou envie, l’expérience prouve que nos réactions évoluent, d’une séance sur l’autre et d’une minute à l’autre lors d’une même session. Ce processus dynamique d’échanges vocaux est par nature non figé et se veut donc le moyen idéal pour se mettre dans un état à la fois réceptif et actif. Se décentrer pour mieux écouter, me paraît être indispensable mais surtout un bon moyen d’approfondir et d’enrichir l’expérience.
Si vous souhaitez réagir, rebondir, témoigner, je serais ravie de pouvoir vous lire dans les commentaires!

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2 réponses

  1. marion dit :

    Merci N. pour ton message! Je te souhaite de belles expérimentations à travers la voix, c’est en effet un excellent outil pour se sentir davantage à sa place et découvrir de nouvelles facettes de soi! 😉

  2. N. dit :

    Bonjour Marion, ton article est très intéressant. Je n’ai pas encore participé à un chant pour tous, mais je me suis inscrite à un atelier. Un médecin m’a conseillé la pratique du chant pour traiter des phobies sociales. Les aspects relationnels que tu évoques dans la partie « quel rôle je joue devant les autres », font écho à beaucoup de situations de mon quotidien. Donc je suis vraiment enthousiaste à l’idée de participer à ce stage, d’un point de vue thérapeutique, artistique et hédonique.

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